Asymetria - revue roumaine de culture, critique et imagination

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    Mori de hârtie: Claude Karnoouh. Etranger a soi-meme.
    Scris la Thursday, June 11 @ 22:52:49 CEST de catre asymetria
    Memoria

    Dupã lectura dosarului de urmãrire informativã, pe care Securitatea i l-a consacrat, cercetãtorul Claude Karnoouh a scris un text a cãrui versiune româneascã va apare în revista Cultura din București, probabil sub titlul Strãin de sine (Etranger à soi-même). E una din rarele ocazii în care un strãin care cunoaște bine România și care a fost subiectul supravegherii continue, comenteazã comportamentul confraților sãi români, care nu ezitau sã toarne la cerere sau din proprie inițiativã, din motive așa zis patriotice.
    Dan Culcer




    Etranger à soi-même

    « Profonde est la haine qui brûle la beauté dans les cœurs abjects. » Ernst Jünger, Les falaises de marbres.


    Je viens de terminer la lecture du dossier établi sur mon compte par la Sécurité entre 1973 et 1984. J’en ressors non pas dégoûté d’y avoir découvert les délations de quelques bons collègues qui, non seulement rapportaient nos conversations privées, mais en rajoutaient, et en rajoutaient beaucoup sur les étapes de ma vie, mes opinions, mes pensées, comme s’il avait fallu qu’ils justifiassent leur bassesse en faisant de moi un véritable mouton noir, un ennemi du peuple roumain, et, last but not least un anthropologue incompétent vendu aux Hongrois !
    Tant et si bien que pendant cette lecture, je me suis souvent demandé si c’était bien de moi, de Claude Karnoouh, né le 25 mars 1940 à Paris 18e en France, dont il était question dans le décours de ces dizaines de pages de rapports… Même s’il s’est écoulé parfois plus d’un quart de siècle depuis les « faits » rapportés, je ressens une forte impression étrangeté à moi-même, une sorte d’extranéité, d’aliénation vulgaire, en lisant une partie de ma vie résumée et interprétée selon une grille modelée par le seul soupçon d’espionnage : revoir une partie de mon courrier intercepté, lire tant de délations, tant de rapports de filatures et de conversations téléphoniques, en bref remonter dans le temps d’une vie qui, en définitive, eût été la mienne. Or, les lettres que j’ai mandées naguère à celle qui, en ce temps, était mon épouse ou à mon ami le plus intime et mes carnets personnels témoignent exactement du contraire.
    Chaque rencontre, chaque conversation, à tout le moins celles rapportées par les « bons » informateurs, les « bons » patriotes, « Maria », « Magda », « Sonia », « Cornelia », « Balint », « Apam », « Jean », « Gigi », « Pierre », « Coca », « Dimitri », « Rohianu », etc. ont été prises pour argent comptant, alors que souvent, sachant l’espionnite ambiante qui régnait, il n’était de ma part que rhétorique du dialogue ou petite provocation, un style de conversation cherchant à déjouer les pièges et tenter de saisir ce que l’autre a dans la tête, si toutefois il a une tête. Et c’est bien ainsi : comme l’avait déjà écrit Nietzsche, « la vie n’est que le théâtre de la vie », car nous sommes tous dans un rôle eût ajouté Pirandello. Mais les canailles (je parle des informateurs-délateurs) ne pouvaient pas même concevoir un seul instant cette part de jeu qui anime la conversation, la rend plus vivante, plus insaisissable, plus cryptique aussi, tant la peur de ne pas servir immédiatement le maître et une lâcheté abyssale leur tenaillaient les tripes. Et pourquoi ? En ces années 1970-1980, ils le faisaient pour un plat de lentilles, car le temps du goulag roumain était bien passé…
    De plus d’autres ne l’ont pas fait, soit l’ont évité habilement soit, plus fermement, l’ont refusé. J’en ai les preuves par l’absence de rapports, voire de références à des jugements qu’ils eussent prononcés en public. Combien de bêtises, que dis-je d’absurdités, n’ai-je pas lu sur mon compte, mais surtout quel sentiment étrange de distance à moi-même que de me voir dans une glace dont le reflet me renvoie une sorte d’objet déformé en tous sens, moi, « objectivul » comme souvent les rapports me nommaient, quoique les flics usassent aussi de mes noms de code (conspirativi !) : « Carol », « Cucu », « Doctorandul »…
    Si donc la Sécurité n’avait pas été l’institution du contre-espionnage de l’état, j’eusse crû participer à une sorte de jeu de piste comme je le faisais quand j’étais un jeune scout.
    Tous ces hommes, toutes ces femmes, environ une quinzaine d’individus dont j’ai en partie deviné les noms en fonction de situations précises où je me trouvais par les propos qu’ils rapportaient, sont à présent actifs dans leurs domaines de spécialité : certains ou certaines ont obtenu, après la pseudo-révolution, d’importantes fonctions dans l’appareil culturel de l’état, d’autres ont quitté le pays, exerçant leurs talents à l’étranger, essentiellement aux états-Unis, d’autres enfin sont retournés ad patres (Que Dieu ou la Divine Providence leur pardonne, sait-on jamais !).
    On rencontre dans ces pages que j’ai lues sans dégoût – étant déjà protégé spirituellement par nombre de mes analyses du postcommunisme roumain –, mais avec un certain amusement teinté d’un profond mépris rétroactif pour ces êtres, on y rencontre donc toute la misère humaine, toute la faiblesse humaine et ce d’autant plus présente que, au moins pour ce qui concerne ma présence à Bucarest, il était uniquement question d’intellectuels. Preuve, une fois encore, que l’érudition, le savoir et le savoir-faire, la capacité de lire et de comprendre des textes, de les classer, de les commenter, tout cela n’engendre pas simultanément le sens de la rigueur éthique. Il est vrai aussi, qu’en dehors d’une érudition locale, la plupart de ces intellectuels (mais pas tous loin s’en faut) n’étaient que des semi-doctes s’agitant en marge du monde réellement savant, mais il n’empêche, ils avaient aussi leur rôle, fût-il modeste, dans la construction de se qui tient de la culture roumaine.

    Pour ce qui concerne les informateurs de la campagne, plus précisément du Maramures, c’est autre chose. D’une part, je savais que mon ami le pope Antal de Breb était obligé de résumer nos rencontres dont il me donnait une sorte de synopsis avant de les envoyer au colonel de la Sécurité qui répondait de moi. C’est même le père Antal qui m’en fournit le nom, le colonel Bob de Sighet, lequel ne cessait de lui demander des rapports sur mes pensées les plus intimes. Or le pope Antal était tout sauf un imbécile, il avait une vivacité d’esprit fort plaisante pour toute personne qui dialoguait avec lui, aussi rappela-t-il à ce brave imbécile de colonel qu’étant baptisé protestant (et de surcroît fort peu croyant) je ne me confessais, si d’aventure j’eusse dû le faire qu’à Dieu directement, sans intermédiaire aucun. Quant aux autres rapporteurs de mes faits et gestes, j’ai deviné une institutrice de l’école élémentaire, un garçon du village ayant suivi l’université par correspondance (fàrà frecventa, fàrà sperantà comme on le disait alors !), une sorte d’activiste local du parti chargé des maisons de la culture dans les village du rayon municipal, et, enfin, une belle et grosse paysanne chez laquelle il semble que le colonel susnommé venait passer des soirées bien arrosées de palinca (les paysans ajoutaient aussi que ces soirs-là, qui se prolongeaient fort avant dans la nuit, étaient aussi des veillées de « baise » – sic !). De tout ce cloaque la seule exception qui m’attriste, c’est un jeune poète-philosophe qui se prétendait mon ami, mais qui, pour une promotion professionnelle, s’est offert comme informateur volontaire !!! Sic transit gloria mundi !
    Voilà pour les rapporteurs, les délateurs, les informateurs.
    Mais il y a encore, et c’est là où l’on peut mesurer l’incommensurable stupidité de la politique de l’état communiste roumain de la fin des années 70 et des années 80, les rapports de synthèse des officiers de la Sécurité. On y voit comment ces bureaucrates du renseignement fabriquaient les ennemis, non pas de classe puisque moi j’étais marxiste – certes pas vraiment orthodoxe, mais néanmoins marxiste –, mais les ennemis du peuple-nation. Ces tristes crétins, sous prétexte que j’avais donné à Budapest quelques conférences sur l’anthropologie de l’Europe centrale et orientale, et fait quelques comparaisons entre les coutumes rituelles de divers peuples circonvoisins (comparaisons classiques dans l’analyse anthropologique), eurent tôt fait de moi un agent des Hongrois. On comprend ainsi comment ils défendaient bec et ongles leur petit commerce, en excipant de la prétendue protection du pays pour justifier de bons salaires et de gros avantages en nature qui en faisaient la caste privilégiée du régime…
    Outre qu’ils ne comprenaient rien à rien, leurs synthèses, de plus, tenaient d’une affabulation se situant entre le père Ubu (« cela se passait en Pologne donc nulle part » !) pour l’aspect surréaliste, Kafka pour l’ineptie bureaucratique et Caragiale pour l’humour involontaire. Mais la définition donnée de ma profonde personnalité la plus extraordinaire, la plus hors du commun que je n’ai lue jamais sur mon propre compte est résumée à la fin d’une note où mon officier traitant à Bucarest, croyant rassembler dans une connaissance précise des modes de pensée mes opinions écrit ceci :
    « Claude Karnoouh este un om dificil, are opinii tendentioase la adressa României. A citit mult despre România, cunoaste foarte bine limba româna (…) de origina evreiascà, are conceptii semite puternice, adept al extremismului semit… (sic et resic !!!)»
    Une telle formulation appartient au vocabulaire nazi. En définitive ce qui ressort d’une telle affirmation aux résonances très lourdes, c’est que le grand danger de ma présence en Roumanie « socialiste » tenait au fait que j’étais resté fidèle à Karl Marx, lui aussi baptisé protestant et adepte de l’« extrémisme sémite » laïcisé qui a pour nom la lutte de classe ? Toutefois, au cœur de son éclatante bêtise raciste, l’officier ne s’était pas trompé. La Roumanie des années 1980 avait abandonné de longue date le marxisme et le matérialisme dialectique au profit d’une dictature hypernationaliste pratiquant une économie socialisante au profit d’une classe dirigeante qui ne voulait en aucune façon perdre ses avantages. On en a la preuve dans la manière dont le coup d’état déguisé en Révolution qu’elle a parfaitement organisé avec l’armée a fait d’elle la classe politico-affairiste qui domine aujourd’hui le pays… Il est parfois, involontairement, sous la plume de fonctionnaires de police obtus, des rencontres ou des télescopages surprenants d’opinions. Je suis sûr que certains y verraient la preuve de l’existence de Dieu !
    Une demi-journée m’a suffi pour achever ma lecture après cette merveilleuse découverte… J’ai fermé mon dossier, l’ai remis à la très aimable personne qui surveillait la salle de lecture et décliné poliment l’offre d’en avoir une photocopie… Après avoir signé tous les documents attestant ma lecture, j’ai quitté le CNSAS pour ne plus y revenir… La vie est courte, et à mon âge plus courte encore, aussi ne faut-il pas perdre son temps avec ce qui pollue et la vue et la pensée…
    Mais, et c’est en fin de compte l’ironie de l’histoire, un certain nombre de voyages que j’ai entrepris, d’aventures et de péripéties que j’ai eues en Roumanie entre 1973 et 1984 sont demeurées inconnues des services de la Sécurité, s’étant déroulées ailleurs qu’à Bucarest et qu’au Maramures, hors donc des seules circonscriptions administratives où j’étais censé résider, sans filatures ni délateurs pour en rapporter la présence. Car, et il faut le rappeler sans cesse, dans les années 70-80 du siècle dernier, les services de la Sécurité étaient à la hauteur de toutes les organisations et institutions roumaines : désorganisés, confus, dysfonctionnels, cafouilleux, irrationnels et, last but not least profondément corrompus… Et cet état des choses humaines, très humaines, laissait donc une part non négligeable de liberté. Je dois dire que je ne me suis pas privé d’en jouer.
    Claude Karnoouh
    Bucarest, mai 2009

     S’il me lit qu’il sache qu’il mériterait encore deux claques pour son imbécillité des plus crasse.
     Cet attribut m’est resté dans les premières années de postcommuniste ; si bien que je me demande encore si au début des années 1990, quand j’enseignais à l’Université Babes-Bolyai, certains intellectuels de Cluj n’avaient pas été instruit de ces rapports par le SRI ?
     "Claude Karnoouh est un homme difficile à manier, très têtu, et de mauvais caractère. Il a des opinions tendancieuses à propos de la Roumanie. Il a beaucoup lu sur la Roumanie et connaît très bien le roumain, mais étant d'origine juive il a de puissantes conceptions sémites et est adepte de l'extrémisme sémite." (sic et resic !!!).
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