Who's Online
Exista in mod curent, 22 gazda(e) si 0 membri online.
Sunteti utilizator anonim. Va puteti inregistra gratuit dand click aici |
Languages
Select Interface Language:
|
| |
Restituiri: Nicolae Gheorghe - activiste rom et pourfendeur de la raison tsigane
Scris la Wednesday, January 15 @ 13:12:14 CET de catre asymetria |
«Jusqu’à la fin de sa vie Nicolae GHEORGHE l’a dit et répété à qui voulait l’entendre que l’on est tsigane d’abord aux yeux de l’autre et que lui-même n’avait qu’une envie : pouvoir choisir d’être ou ne pas être tsigane. Pour lui, il ne s’agissait pas là d’une simple « vérité » scientifique, qui faisait l’unanimité parmi les anthropologues depuis la parution de la thèse de Fredrik Barth, mais d’une conviction acquise par sa propre expérience et qui l’a littéralement hantée.»
La première fois que j’ai
rencontré Nicolae Gheorghe, au tout début des années 1970, ce fut
par l’intermédiaire d’un ami commun qui l’a présenté d’une
façon assez étrange, sur un ton quelque peu condescendant : « Tu
verras, c’est un collègue (à la fac de sociologie à Bucarest),
eh bien, il n’ose même pas se promener seul les samedi soir de
peur d’être pris pour un þigan borât (Tsigane
vomi) ». Ainsi averti, j’avais bien remarqué que son teint était
un peu foncé tandis que ses joues semblaient marquées par la
variole, mais cette description ne m’a guère impressionné, les
tensions et la menace de conflits imminents entre les Tsiganes et les
Roumains étant un des sujets favoris de cet ami, lui-même
originaire d’un village des alentours de Bucarest qui comptait de
nombreux habitants tsiganes. Sur le coup, nous avons spontanément
sympathisé, puis nous nous sommes perdus de vue pour nous retrouver
une décennie plus tard, à Paris. Entre temps nous avions fait plein
de trucs chacun de son côté, moi, en France, j’avais fait
littéralement le tour des groupes et comités les uns plus radicaux
que les autres, lui il avait parcouru en long et en large la Roumanie
pour recueillir des informations sur les communautés tsiganes grâce
notamment à son travail au Centre de recherches sociologiques dans
le cadre très officiel, jusqu’à 1981, du programme du Parti
communiste roumain d’« intégration des Tsiganes »(1).
Ce qui nous a agréablement surpris c’est que nous nous retrouvions
pratiquement sur la même longueur d’ondes sur plein de sujets
alors que nous nous étions détachés totalement des milieux que
nous fréquentions auparavant. Peu avant son retour en Roumanie, nous
avons enregistré un long entretien qui paraîtra quelques mois plus
tard dans Iztok(2), puis sera
repris intégralement par la Documentation française. Le texte
portait la signature Alexandru Danciu, puisque c’est sous ce
pseudonyme qu’il venait d’envoyer en février à Radio Free
Europe une lettre ouverte au lendemain de l’agression d’un
journaliste français (Bernard Poulet, du Matin) à
Bucarest attribuée par les autorités à des « voleurs tsiganes ».
Dans cette lettre, il exposait la situation précaire des Tsiganes en
Roumanie et critiquait le PCR qui était en train d’abandonner le
programme d’intégration signalé plus haut.
Pendant les trois décennies qui ont
suivi, ses positions n’ont pas fondamentalement changé alors qu’il
se sont passé des choses et surtout que lui, Nicolae Gheorghe, en a
fait des choses !
Pour faire prendre conscience de la
mutation qui a eu lieu au lendemain de l’implosion du communisme en
Roumanie, je rappellerai ce qui à mes yeux rendait et rend encore le
racisme antitsigane insupportable en Roumanie. En effet, il comprend
deux facettes, deux aspects, parfaitement contradictoires mais qui ne
sont pas communément conçues comme contradictoires malgré
l’évidence. D’une part, nombre de Roumains rejettent avec
violence ceux dont le comportement correspond peu ou prou aux
stéréotypes courants sur les Tsiganes : « Ils ne travaillent pas,
ils volent, ils ne respectent aucune morale ou, plus précisément,
ils ne veulent pas travailler, être honnêtes, suivre des principes
moraux comme nous autres Roumains nous le faisons ou nous nous
efforçons de le faire. D’autre part, ces mêmes Roumains sont à
l’affût du moindre indice qui leur permette de repérer, parmi les
gens qui travaillent, qui sont honnêtes, ceux qui en raison de la
couleur de leur peau, de leur regard, de leur façon de s’habiller,
seraient en réalité des tsiganes, des gens qui peuvent par
conséquent à tout instant retourner à leur condition première,
celle de faignants, de malhonnêtes, de débauchés. Autrement dit,
pour faire appel à une notion dont on use et on abuse de nos jours :
« Ils ne veulent pas s’intégrer ! » et, quand ils le font : «
Gardons-les à l’œil ! » Pour casser ce cercle vicieux,
court-circuiter à cette « logique » dévastatrice, il n’y a pas
trente-six solutions : « Oui, je suis tsigane, je suis rom
(3), je travaille ou je ne travaille pas, je suis
honnête ou non, comme vous autres roumains, que cela vous plaise ou
non ! » Encore faut-il, pour qu’un tel choix porte à conséquence,
que la conjoncture historique soit propice et que des gens
franchissent le pas sans hésiter. C’est ce qui s’est passé en
Roumanie dès le début des années 1990 et nous avons là un des
très rares aspects que l’on puisse qualifier de révolutionnaire
dans ce pays où l’on parle sans sourciller de « révolution »
tout court à propos des événements de décembre 1989. Dans la mise
en route de cette nouvelle dynamique et lors de ses premières
manifestations, Nicolae Gheorghe a joué un rôle clef. La première
structure organisationnelle du mouvement, la Fédération ethnique
des Roms, a été fondée, en mai 1990, à l’improviste, dans le
bureau qu’il occupait à titre de conseiller pour les minorités
du Comité provisoire d’unité nationale (CPUN) dans l’ancien
siège du Comité central. Evidemment, nous avons affaire à un
processus complexe dont les retombées sont contradictoires : depuis
la chute du régime communiste on assiste, par exemple, à une montée
en flèche de l’animosité envers les Roms qui, par ailleurs, ont
été les principales victimes du démantèlement des coopératives
agricoles et des grandes industries (4).
Cependant, personne ne saurait à la longue arrêter la dynamique
enclenchée en cette occasion par la remise en question par les
Tsiganes eux-mêmes de la condition subalterne à laquelle ils ont
été astreints en Roumanie.
Fin décembre 1989, nous nous
sommes ratés de peu aux alentours du siège du Comité central du
PCR squatté depuis quelques jours par Nicolae et quelques autres
insurgés qui observaient avec stupéfaction les allées et venues
des nouveaux maîtres du pays. Puis, nous nous sommes revus à quatre
ou cinq reprises, toujours plutôt par hasard, et, chaque fois, nous
avons causé nuit et jour sans relâche, toujours contents de nous
retrouver sur tout ou presque, ce qui nous arrivait si rarement avec
les autres. Il y en avait un qui commençait la phrase, l’autre qui
la continuait. Pour ma part, je dois l’avouer, j’étais fort
impressionné par ses exploits en matière d’activisme civique en
faveur des Roms, par son refus d’entrer dans les combines des
nouveaux partis roms, corrompus à l’instar des autres partis mais
avec des conséquences encore plus dramatiques pour ceux qu’ils
prétendaient représenter, inquiet quand il avait été enlevé par
les nervis du roi des Roms (début 1991), étonné par ses
retrouvailles par la suite avec ce même « roi », heureux quand
j’avais des nouvelles à propos des programmes d’alphabétisation,
sanitaires et éducatifs menés par le Romani Criss, ce centre
d’intervention sociale qu’il a fondé en 1993, et par les actions
qu’il menait à Varsovie, à la tête du bureau Roma de l’OSCE
(1999-2006) et assez flatté quand il m’a raconté comment il
s’était procuré le livre que je venais d’écrire en 1993 sur
les Aroumains pour le montrer à ses interlocuteurs d’origine
aroumaine comme nombre d’habitants de la commune Mihail
Kogalniceanu, suite à l’expédition punitive menée contre des
Tsiganes dans cette commune. « Vous êtes aussi une minorité, vous
avez connu aussi la déportation comme nous, les Tsiganes, nous
devrions nous entendre… » La position de Nicolae Gheorghe sur
cette affaire qui remonte à septembre 1990 est emblématique pour sa
démarche tout au long de cette période. Il a lancé le cri
d’alarme, en posant en des termes aussi politiques que possible le
problème, accusant les auteurs des méfaits d’avoir commis un
pogrome à caractère raciste et les autorités de les avoir laissé
faire (5). C’était une première en Roumanie.
Mais c’est lui aussi qui a tout fait pour tenter de trouver une
solution négociée. Enfin, en 2011 il déclarait lors d’une
conférence : « Ce que je peux dire vingt ans après, et que je n’ai
pas dit en ce temps, c’est que les maisons incendiées
appartenaient surtout à ceux qui étaient connus pour des
infractions. » (6), tout en rappelant que la
multiplication de ce genre d’incidents pendant la période
1989-1997, qui se sont soldés par une dizaine de morts et presque
trois cents maisons incendiées donnait l’impression de l’existence
d’un véritable « pattern », modèle punitif.
Cette façon d’alterner des
positions radicales et modérées en fonction d’une analyse
soucieuse avant tout de prendre en compte les réalités, de même
que sa conception fluctuante du « nous » en parlant des Tsiganes
n’ont eu de cesse de surprendre ses interlocuteurs et, surtout,
d’exaspérer son entourage.
L’activiste
civique face à la dialectique confiance/roublardise
Jusqu’à la fin de sa vie il l’a
dit et répété à qui voulait l’entendre que l’on est tsigane
d’abord aux yeux de l’autre et que lui-même n’avait qu’une
envie : pouvoir choisir d’être ou ne pas être tsigane. Pour lui,
il ne s’agissait pas là d’une simple « vérité »
scientifique, qui faisait l’unanimité parmi les anthropologues
depuis la parution de la thèse de Fredrik Barth, mais d’une
conviction acquise par sa propre expérience et qui l’a
littéralement hantée. Il était issu d’une de ces familles de «
bons Tsiganes », dont la situation matérielle était parfois
meilleure que celle d’autres familles roumaines habitant les mêmes
quartiers périphériques de Bucarest. Si on les traitait souvent de
« Tsiganes tout court », leur principale préoccupation n’était
pas moins d’éviter de rejoindre les « mauvais Tsiganes », les
pauvres qui vivaient aux marges de la société, mendiaient,
volaient. Il racontait comment sa mère se rappelait avoir échappé
à une razzia en 1942 parce que des voisins l’ont reconnue comme
étant la femme d’Anghel Tsiganul, le chauffeur – la déportation
concernait seulement les Tsiganes enregistrés comme « nomades ».
Excellent élève, Nicolae Gheorghe a fait le lycée militaire en
internat puis a passé avec brio le concours d’admission à la
faculté de sociologie en 1968 pour devenir ensuite chercheur en
1973. « Bon Tsigane » aux yeux des uns, « Tsigane tout court »
aux yeux des autres, intrigués ou jaloux de ses performances
intellectuelles (tel notre ami commun évoqué plus haut), il ne
s’est engagé qu’après la fin de ses études. Mais il l’a fait
pour de bon et avec une énergie sans pareil. Le romani, il l’a
appris sur le terrain, et les contacts avec une famille réputée de
la zone de Sibiu dont le bulibaºa (chef de clan)
allait se proclamer roi, l’ont aidé dans sa démarche tout en lui
compliquant la vie et en le poussant à des compromis sur lesquels il
reviendra à maintes reprises (7). Etait-il pour
autant tsigane ? Sans doute, mais pas seulement, pas toujours, se
plaisait-il à dire, en provoquant ses interlocuteurs roms,
fraichement engagés dans le mouvement civique et formés pour la
plupart par lui-même, avec des réflexions incommodes destinées à
leur faire prendre conscience de la complexité de leur tâche.
A plusieurs reprises, je lui ai
demandé pourquoi il n’écrivait pas davantage, non pas des
rapports, des tribunes ou des mémoires, mais dans son domaine, la
sociologie, qui lui était si cher. Chaque fois que j’ai tenté de
l’inciter à le faire, il repoussait les échéances. En réalité,
à bien regarder, entre la fin de ses études, en 1972, et le 22
décembre 1989, il a fait du terrain, plus que quiconque, recueilli
des matériaux, témoignages, histoire de vie, en compagnie parfois
de confrères occidentaux déjà réputés ou qui allaient devenir
des spécialistes des Roms. Pour ce qui est des aspects historiques,
des explications, des éventuelles solutions et surtout des impasses
communautaristes ou nationalistes auxquelles elles risquaient de
mener, il en avait fait le tour. Il ne ressentait donc pas le besoin
de revenir sur toutes ses questions, de multiplier les interventions
aux colloques, de pondre des articles dans les revues de spécialité,
de donner des cours dans des universités prestigieuses qui
l’auraient accueillis volontiers en raison de sa réputation
acquise dès la fin des années 1970 (8). Il y
avait comme une fébrilité chez lui dans ce sens que, visiblement,
conscient de savoir, il n’avait qu’une envie : faire, agir.
Tiraillé entre le souci
d’efficacité dans les actions qu’il promouvait et des causes
qu’il défendait dans des situations le plus souvent d’urgence,
d’une part, et, d’autre part, par son regard lucide et avisé de
sociologue et ses propres convictions, désirs et états d’âme, il
n’est jamais parvenu à endosser les habits du bureaucrate européen
influent, du politicien roumain plus ou moins respectable et/ou un
intellectuel brillant mais soucieux de sa carrière, alors qu’il a
occupé des postes de responsabilité au sein d’organisations
internationales telles que l’OCDE, alors qu’il a joué un rôle
politique clef à la fois par ses interventions publiques et comme
conseiller gouvernemental et qu’il était si apprécié sur le plan
professionnel à Londres comme à Paris ou à New York. Il ne l’a
pas cherché non plus, loin s’en faut, et de ce point de vue son
pari est réussi. Il a fait autre chose, il a déclenché le
mouvement et l’a animé tout en faisant ce qui était dans ses
moyens pour en empêcher les dérives.
A vrai dire, son plus grand plaisir,
surtout depuis la fin de sa mission à Varsovie, fut de pratiquer
l’anthropologie avec ses propres « coethniques » actifs dans le
mouvement civique, souvent formés par lui-même. Devant le danger de
les voir sombrer dans un nationalisme soupçonneux ou embrasser des
carrières politiques douteuses, il les interpellait dans l’espoir
de provoquer chez eux une prise de conscience critique. A cette fin,
il n’hésitait pas de se donner lui-même en exemple en racontant
comment, peu après s’être affirmé comme tsigane et quadrillé le
pays avec les kalderash, il s’est marié avec
une Roumaine à la surprise générale. « Je n’étais pas obligé
de me comporter en tsigane, c’était mon droit, comme individu, de
choisir. Et je me suis dit que j’ai échappé ainsi à l’oppression
ethnique de tsigane, produite par l’histoire et arrivée jusqu’à
moi sous la forme d’un préjugé, d’un stigmate. (…) L’identité
ethnique comme option, comme opportunité de choisir, te donne un
espace de liberté. Pour beaucoup, cette option n’existe pas
encore, n’est pas possible », se confessait-il à Iulius Rostaº à
l’été 2011 à Salerno où il se trouvait en traitement chez sa
fille (9).
La journaliste Oana Sandu a fait
paraître dans la revue DOR, n° 12 (août 2013)
un très beau texte retraçant la vie et les combats de Nicolae
Gheorghe, qu’elle rencontré peu avant sa mort à Salerno.
(Cf. :
http://www.decatorevista.ro/nicolae-gheorghe-dor12/
Dans ce texte, qui se recoupe avec
l’entretien réalisé par Iulius Rostaº, elle résume et explique
à sa façon le contentieux de Nicolae Gheorghe avec les siens, tel
qu’il l’a lui-même présenté chaque fois qu’il a été
sollicité (10).
"En
1993, Romani Criss a démarré un programme d’aide financière et
professionnelle destiné à plusieurs communautés de Roms pour
démarrer de petites affaires. Ceux qui recevaient l’argent
auraient dû arriver à faire du profit et rembourser l’argent reçu
sans payer d’intérêts afin que d’autres communautés roms
puissent en bénéficier. Nicolae rêvait à quelque 200 petites
affaires, et, pendant six ans, en utilisant des donations fournies
par des organisations internationales, a financé des projets d’une
valeur de 600.000 marks.
Ce fut un projet ambitieux qui s’est
soldé par un échec cuisant. On a fait des plans d’ateliers de
briqueterie, de tannage, de vannerie, de métallurgie. La seule
condition requise était de s’associer. Très peu parmi ces
affaires ont vu le jour et encore moins ont débouché sur des
profits. Lors des contrôles, les intéressés trouvaient toujours
des excuses : ils ne trouvaient pas la clef où se trouvait la
matière première, ils invoquaient un décès dans la famille,
prétendaient qu’ils étaient exploités…
Nicolae s’est senti berné et
perçu comme un non-rom par les Roms alors qu’il pensait avoir
établi non seulement un contrat sur papier mais aussi un contrat
moral, fondé sur le pakiv (confiance). « J’ai
vu un caractère des Roms que j’ignorais, qui est pratiqué
peut-être en famille, dans le clan mais pas dans les relations avec
des gens de Romani Criss ou un Nicolae Gheorghe, perçu comme un
non-rom, comme un gadjé. La règle de base est de berner le gadjé
et non pas de tenir parole.
Il a ressenti alors la faille qui
sépare la mission de l’activiste civique du Rom traditionnel."
Cependant, quand
on lit ses propos dans l’entretien avec Iulius Rostaº, les choses
semblent plus complexes, même si l’aversion Nicolae Gheorghe pour
la dialectique confiance, à l’intérieur du
clan/roublardise vis-à-vis du monde extérieur –
trait qui ne caractérise pas seulement les Roms dans les Balkans - a
été constante.
"On
ne peut pas être activiste des droits de l’homme – ce qui relève
d’une ontologie sociale, d’une éthique de l’universalité, de
valeurs judéo-chrétiennes poussées jusqu’au bout – et, dans le
même temps, rom, selon les règles des différentes groupes roms,
selon des valeurs de communautés qui, pour survivre et pour se
protéger (sur le plan culturel mais aussi en matière de sécurité
personnelle et de groupe), ont évité le monde qui les entourait, se
sont construites en marge de ce monde. La pratique historique de ces
communautés « traditionnelles » est fondée sur une relation
d’exploitation du monde qui les entoure : le monde qui les entoure
les a exploitées, elles l’ont exploité à leur tour. Cette
relation n’est pas d’égalité mais asymétrique, hiérarchique,
d’hégémonie du monde extérieur."
L’identité tsigane s’est
maintenue grâce aux clans, expliquait-il, le problème est de savoir
comment bâtir un « projet ethno-politique » qui pourrait aboutir à
un corpus national « paneuropéen », à un « peuple politique » ?
« On peut être rom aussi sans être victime, en assumant l’histoire
des Roms. En fin de compte, être rom est aussi une victoire, c'est
une survie dans l’histoire qui mérite d’être célébrée. »
A la génération qui a investi
l’activisme civique d’apporter une réponse ! Pour le faire, elle
doit remettre en question sa propre relation avec les milieux
traditionnels dont ses membres sont issus ou dont ils se réclament.
Aussi appelle-t-il ses confrères au « réveil du sommeil dogmatique
de l’identification ethnique spontanée, qui ne passe pas par une
pratique fondée sur la réflexion. (…) Nous avons certes réussi
imposer nos idées sur le plan international, pas dans les pratiques
au niveau local, faisait-il remarquer. Les communautés roms
demeurent dominées par les leaders de pratiques non démocratiques,
autoritaires voir à caractère criminel.
Retour au
nomadisme, nouveau nomadisme ?
« Nomade » est le mot qui convient
le mieux à Nicolae Gheorghe, il n’arrêtait pas de bouger,
écrivait l’auteur de la page que l’Economist
(17/08/2013) lui a consacrée au lendemain de sa mort. Il s’agissait
d’une métaphore, que l’on retrouve sous diverses formes dans les
autres textes parus en cette occasion, mais qui renvoie, qu’on le
veuille ou non, au nomadisme associé aux Tsiganes dans l’imaginaire
collectif ainsi qu’à une certaine mobilité bien réelle de pans
entiers de la population rom. Cet aspect de Nicolae Gheorghe m’avait
toujours frappé aussi, d’autant plus que, de mon côté, j’ai
toujours eu une certaine propension pour la mobilité. De surcroît,
je suis moi-même issu d’une ethnie éparpillée (dispersée ?),
donc minoritaire à l’époque moderne, longtemps marquée par un
certain type de nomadisme, le nomadisme pastoral pratiqué dans le
cadre de l’élevage extensif qui a permis à cette ethnie de
conserver et perpétuer son particularisme, sans pour autant trouver
sa place dans les Balkans à l’heure des Etats nations. Par
ailleurs, et c’est peut-être le plus important, j’ai eu il y a
une dizaine d’années comme une révélation au bord d’un train
qui traversait les contrées méridionales de la Valachie à la vue
de femmes et d’hommes, de vieillards et d’enfants, parfois tout
nus, dans un état de dénouement extrême, qui erraient dans les
champs avec leurs affaires, tout cela dans un paysage désolant, de
coopératives abandonnées, de terres en friche…
Retour au nomadisme, nouveau
nomadisme ? En m’interrogeant là-dessus, je me suis rappelé que
par le passé, à propos des Aroumains, je n’ai pas trouvé de
réponse convaincante à la question de savoir si les nomades étaient
sédentaires à l’origine ou si les sédentaires provenaient des
nomades. Puis je suis revenu sur terre : ceux que je voyais étaient
littéralement poussés par la faim et la misère sur les routes et
la question du nomadisme de leurs ancêtres était pour le moins
déplacée. Enfin, pour ce qui est de la mobilité dont faisait
preuve à sa façon Nicolae Gheorghe, elle était d’un type bien
particulier. Quels rapports entre ces pauvres bougres dont certains
allaient se retrouver eux aussi aux quatre coins de l’Europe et
Nicolae Gheorghe navigant de conférence en réunion de travail
entre Bucarest, Varsovie, Washington ou Bruxelles? Il y en avait
peut-être, mais à vrai dire c’est la différence qui saute aux
yeux : Nicolae Gheorghe, lui, avait choisi, s’est donné les moyens
pour choisir, le plus souvent à contre-courant d’ailleurs, ce
pourquoi il a payé le prix fort.
Sa dernière intervention
retentissante a eu lieu à la Conférence sur la contribution des
Fonds européens à l’intégration de la population rom, qui s’est
tenue à Bucarest, les 12 et 13 octobre 2010. Elle portait justement
sur le nomadisme, dont l’« invention » au sujet des Roms,
estimait-il, leur avait déjà occasionné des dégâts par le passé
et risquait de leur réserver de mauvaises surprises à l’avenir.
Pour contrer cette dérive, il propose un raisonnement sociologique
historiquement ancré à partir d’un moment clef, l’abolition
définitive, en partie sous la pression de l’Angleterre et de la
France, de l’esclavage des Tsiganes dans les pays roumains à la
veille de la formation du premier Etat roumain en 1859 (11).
La catégorie « nomade » a été
forgée au XXe siècle, dans les années 1930, fait-il remarquer, en
rappelant les débats, qui avaient commencé plus tôt en pays de
langue allemande, sur les dangers de contagion pour la société que
représentaient les « nomades », qui ont conduit par exemple la
Commission de roumanisation à délivrer aux Tsiganes installés
(aºezaþi, pãmânteni) des certificats de «
Tsiganes roumanisés » (12). Toujours dans les
années 1930, en URSS, c’est le qualificatif « nomade » qui a
permis aux autorités de réprimer les artisans roms et leurs
familles étendues en déplacement en raison de leurs activités. Ce
phénomène se reproduira dans les pays du bloc de l’Est dans les
années 1950.
Pour désigner les réalités
auxquelles on se référait traditionnellement en parlant de nomades,
il propose une autre catégorie, plus appropriée, d’« itinérants
», dans l’acception courante du mot : personnes qui se déplacent
d’un lieu à un autre afin de déployer une certaine activité,
profession (travail du métal, du bois, musique, négoce…). Ces «
Tsiganes du prince », comme on les appelait par le passé,
bénéficiaient d’une certaine liberté de mouvement alors qu’en
Moldavie et en Valachie nombre de Tsiganes dépendaient des
monastères et des boyards. Ils étaient littéralement des esclaves
(en roumain rrobiobi). Leur
libération marquera un tournant à tous points de vue. C’est à
partir de cette date que ce qui désignait un statut juridique et
socio-économique particulier acquerra progressivement une
signification ethnique (13). Cela étant dit, à
partir de cette date les Tsiganes, dont la situation économique ne
cessera de se dégrader, sont des citoyens roumains. Théoriquement,
parce que tout le problème est là, d’une manière ou d’une
autre jusqu’à nos jours. En effet, être citoyen dans un Etat
national, comme la Roumanie, sans appartenir à la nation et/ou sans
être reconnu comme tel, et se situer presque systématiquement en
bas de l’échelle sociale pose de sérieux problèmes dont
l’accumulation a conduit à la situation critique que l’on
observe de nos jours. La reconnaissance de l’appartenance à une
nation à part, rom, fait partie des conditions permettant le
déblocage de la situation, mais à elle seule elle ne mène pas
loin. A maintes reprises, Nicolae Gheorghe a rappelé que c’est
parce que l’Etat est national, y compris formellement après 1989,
que la reconnaissance de la nationalité rom est nécessaire. L’autre
condition, et c’est tout le combat de Nicolae Gheorghe, est que les
Roms soient acceptés comme des citoyens à part entière et qu’à
leur tour ils vivent pleinement leur citoyenneté, s’impliquent
dans la vie de la cité.
« Nous en avons assez des
Tsiganes !"
Ce n’était pas la première fois
qu’il s’insurgeait contre cet usage abusif du stéréotype «
nomade » et contre les solutions exceptionnelles censées résoudre
un problème non moins exceptionnel, celui des Roms de Roumanie et
des pays de l’Est et du Sud-Est européen (14).
Cette fois-ci, il l’a fait dans un contexte particulier, dans la
foulée des diatribes de Sarkozy et de ses conseillers contre les
Roms et des « réponses » des autorités roumaines. Les uns et les
autres s’empressaient de décréter « nomades » les Roms expulsés
de France vers la Roumanie, les media s’en mêlaient, et une idée
neuve apparemment généreuse faisait son apparition : les Roms sont
un « problème européen », la solution ne saurait être
qu’européenne, etc. Pourquoi ces gens-là, sédentaires pour la
grande majorité d’entre eux depuis un bon moment, qui tentaient
tout simplement d’échapper à la grande pauvreté seraient-ils des
nomades ? En réalité, fait-il observer, les différents
gouvernements essaient de se défausser des problèmes soulevés par
les Roms sur l’Europe. Le titre de son exposé est explicite : «
Nous avons un problème roumain et non pas « européen ». La
véritable approche européenne, rappelle-t-il, s’appuie sur le
principe de subsidiarité de l’Union européenne, selon lequel les
questions doivent d’abord être résolues au niveau local. La
véritable citoyenneté se traduit alors de bas en haut, du niveau
local vers le niveau national et la citoyenneté européenne devient
un élément de « valeur ajoutée ». Telle n’est pas l’approche
de la citoyenneté en Roumanie, loin s’en faut, les préoccupations
y sont d’une autre nature. Le tableau qu’il dresse de la
mentalité qui prévaut dans ce pays est tout aussi réaliste
qu’effrayant :
("« Nous en avons
assez des Tsiganes ! » : cette pensée fait partie de la psyché
publique roumaine depuis les déportations pendant la Seconde Guerre
mondiale. La migration massive des Roms depuis l’adhésion à
l’Union européenne s’inscrit dans la forte mobilité
internationale des citoyens de la Roumanie (environ 3 millions se
sont expatriés depuis 1990). Le phénomène est spontané, mais sert
le but (déclaré ou non) de « sortir » les Roms d’un certain
nombre de communautés locales. Cette façon d’envisager les choses
- qui coquète avec l’idée que les Roms devraient « devenir
européens », qu’ils seraient des « citoyens de l’Europe »
avant les autres - est fondée sur l’idée que les Roms vont
partir, et qu’ainsi les Occidentaux les auront à leur charge et «
comprendront notre malheur ». Tout cela m’inquiète. La
présentation des Roms comme des citoyens sui generis constitue un
argument subtil dans un long débat qui a quelques fâcheux
antécédents dans l’histoire mentale et politique de la Roumanie
moderne et contemporaine, mais la solution du « problème des Roms »
doit être trouvée ici, en Roumanie.") (15)
En filigrane de l’inquiétude dont
fait part avec tant d’insistance Nicolae Gheorghe à propos de ce
statut sui generis conféré dernièrement aux Roms, on peut lire, me
semble-t-il, une crainte plus profonde, qui porte sur une perspective
autrement plus sombre que ce que nous avons vu jusqu’à présent,
celle de voire les Roms retrouver à l’échelle de l’Europe la
condition de parias dont parle Hanna Arendt. Au cours de la Seconde
Guerre mondiale, les nomades étaient déportés collectivement, les
sédentarisés seulement individuellement.
Depuis 2007, Nicolae Gheorghe agit
en outsider, en philosophe, écrit Oana Sandu qui raconte comment,
gravement malade, il continuait à faire des virées en ville, à
Salerno, à la rencontre de Roms mendiant aux coins des rues pour
s’enquérir de leur sort, les incitant à participer aux activités
d’une association en train de se créer, à envoyer les enfants à
l’école... Loin de s’endormir sur les acquis du mouvement qu’il
a fondé et animé, il continuait à manifester le désir d’aller
de l’avant tout en avouant que les grandes questions qui l’avaient
hanté restaient à débattre. « L’économie socialiste était-elle
la solution, dans sa manière de donner du travail à tous ? La
pensée anarchiste apportera-t-elle une réponse à nos besoins en
auto-organisation ? s’interrogeait-il dans un entretien avec Julia
Beurq, en ajoutant que « Même si cela peut sembler utopique, nous
avons besoin de connaissances en coopératives sociales »
(16).
Nicolas Trifon
Le texte de N.Trifon figure
dans le dossier consacré au nomadisme par la revue Au sud
de l’Est, n° 10 (Paris : éditions Non Lieu, 2014)
NOTES
1. Critiqué pour
son intervention lors d’une conférence internationale sur le thème
« les Roms, une minorité non reconnue dans les Balkans », il est
réorienté en 1981 vers le programme « Développement rural ». Peu
après, commencent ses problèmes avec la Securitate, qui va
l’interroger à plusieurs reprises.
2. «
Introduction au problème tsigane à l’Est » Iztok, revue
libertaire sur les pays de l’Est, n° 5 (septembre 1982)
et 6 (mars 1983) Cf.
http://www.la-presse-anarchiste.net/spip.php?rubrique175
3. L’usage du
mot « rom » s’est progressivement généralisé depuis son
adoption lors du premier Congrès mondial des Roms (Londres, avril
1971) et on ne peut que s’en féliciter*. S’agissant de la
Roumanie, je continue à utiliser en alternance « tsigane », terme
courant dans ce pays y compris parmi les Roms. Le mot « rom » est
souvent utilisé de manière pernicieuse dans les médias roumains.
Chaque fois que la moindre occasion se présente, on parle de « rom
» en faisant sentir qu’il s’agit d’une obligation en quelque
sorte (d’autant plus fâcheuse qu’il y a confusion possible avec
« roumain ») et, surtout, de telle façon que ce mot véhicule dans
les faits les mêmes stéréotypes que « tsigane » puisqu’il est
accolé aux criminels, prostitués, délinquants et autres vagabonds
; précisons que ce genre de précision n’ont pas cours lorsqu’il
s’agit de délinquants non roms.
4. Plus ou moins
cachées à l’époque communiste, les réalités tsiganes sont
apparues au grand jour après 1990 et connu des changements
considérables à l’instar de ce qui se passait pour tout le monde
en Roumanie. Cette nouvelle visibilité n’a pas manqué
d’accréditer des préjugés contradictoires auprès de pans
entiers de la population. Les Tsiganes sont rejetés plus que jamais
aujourd’hui parce qu’ils sont pauvres, et de ce point de vue
être tsigane ou en avoir l’air par son comportement c’est avant
tout un signe d’extrême pauvreté, statut qui hante littéralement
bien des non-tsiganes en voie de déclassement. Mais on les rejette
aussi, et avec encore plus de virulence, parce qu’ils sont
démesurément riches, en pointant les fortunes ramassées par tel ou
tel chanteur, homme d’affaires douteux, chef de clan ou délinquant
notoire. En réalité, la société rom telle qu’elle se donne à
voir, ou plutôt telle qu’elle est perçue, illustre jusqu’à la
caricature les deux traits qui caractérisent la société roumaine
dans son ensemble : paupérisation galopante des uns, enrichissement
ostentatoire des autres. Pour le Roumain ordinaire, cette situation
est jugée scandaleuse et révoltante quand il s’agit des
non-Tsiganes mais naturelle quand il s’agit des Tsiganes.
5. Quelques mois
auparavant, suite aux razzias des mineurs dans les quartiers tsiganes
de Bucarest (14-15 juin), il avait fait adopter à Copenhague une
mention sur les problèmes spécifiques des Roms dans un document de
l’OSCE condamnant le racisme et l’antisémitisme. C’était une
première. A noter que cet aspect a été pratiquement passé sous
silence par les médias et ignoré par l’opinion publique, les
razzias, à l’appel du Président Iliescu, ayant été présentées
comme exclusivement dirigées contre les protestataires de la place
de l’Université et les intellectuels. Sur les 1200 personnes
arrêtées sans mandat en cette occasion 700 étaient d’ethnie rom.
6.
« Despre persecuþia împotriva romilor ºi cum s-a construit
percepþia cã romii sunt anti-Revoluþie », Cosmin Nãvodaru,
HotNews, 28/03/2011.
7. Issu des
kalderash (chaudronniers), une des branches itinérantes les plus
prestigieuses, Ion Cioabã, né en 1935, a connu la déportation en
Transnistrie enfant. Présent déjà au Ier Congrès rom de Londres
en 1971, il se convertira au pantecôtisme et restera en bons
rapports avec le régime communiste puis avec ceux qui se sont
succédé. Les relations de Nicolae Gheorghe avec ce personnage, son
entourage et son fils Florin, qui a pris la succession à sa mort en
1997, ont été en dents de scie. Il éprouvait de la fascination
tout en étant écoeuré par certains aspects. Soucieux de conserver
son leadership dans le monde rom et inquiet à l’idée de se mettre
à dos le pouvoir, Ion Cioabã accusa Nicolae Gheorghe d’extrémisme
et d’antiroumanisme après que celui-ci ait dénoncé du caractère
raciste des violences perpétrées contre des Roms en 1990. Par la
suite, ils sont arrivés à une sorte de compromis, en sorte que
tant Ion que Florin Cioabã ont pris des positions « réformatrices
», notamment au sujet du mariage précoce, à l’instigation de
Nicolae Gheorghe.
Le père de Nicolae Gheorghe était
issu des zlãtari (orpailleurs), la mère des
lãutari (violoneux). Les deux étaient de « bons
tsiganes », intégrés de longues date, en sorte que leur fils n’a
pas été élevé dans la tradition rom.
8. Cf. à ce
sujet l’étude qui lui est consacrée par l’anthropologue
nord-américain Sam Beck en 1993 : « Racism and the Formation of a
Romani Ethnic Leader » dans Perilous states: conversations
on culture, politics and nation, éd. George
E. Marcus, Chicago : University of Chicago Press, pp. 165-185.
9. Entretien
disponible sur Internet sans autre précision, sous le titre «
L’identité romani entre victimisation et émancipation ».
HYPERLINK
"http://bucharest.the-hub.net/files/2012/08/interviu-Nicolae-Gheorghe.pdf"
http://bucharest.the-hub.net/files/2012/08/interviu-Nicolae-Gheorghe.pdf.
Apparemment, sa publication est
prévue dans un ouvrage collectif édité par la Fondation Soros :
HYPERLINK
"http://www.soros.ro/sites/default/files/ro_186_Selectie%20partener%20editorial_De%20ce%20rom%20si%20nu%20tigan.pdf"
http://www.soros.ro/sites/default/files/ro_186_Selectie%20partener%20editorial_De%20ce%20rom%20si%20nu%20tigan.pdf.
Consulté le 27/11/2013. Ce texte est d’autant plus passionnant que
Iulius Rostas - lui aussi sociologue et actif dans les structures de
défense des droits des Roms, né en 1973 - défend très bien son
point de vue, souvent différent de celui de Nicolae Gheorghe.
10.
Cette position ressortait aussi des échanges de méls que nous avons
eu au printemps 2012 qui n’ont malheureusement pas abouti à
l’objectif que nous nous sommes fixé, à savoir la rédaction d’un
livre en français intitulé Des Roms, des Roumains, et autres sujets
qui fâchent.
11. L’esclavage
a été aboli en plusieurs vagues, la dernière ayant eu lieu en 1855
en Modavie, 1856 en Valachie. En Transylvanie, elle a eu lieu en
1785.
12. Les premières
tentatives d’envergure de sédentarisation forcée, entreprises au
nom de la nocivité attribuée au nomadisme des Tsiganes, remontent à
l’administration autrichienne qui, sous Marie-Thérèse puis Joseph
Ier, a émis les décrets de1773 et 1782 appliqués sur le territoire
de la Hongrie. Dans Histoire des Bohémiens ou tableau des moeurs,
usages et coutumes de ce peuple nomade (Paris, Chez Joseph Chaumerot
et Chaumerot Jeune, 1810, éd. allemande 1783), H.M.G. Grellmann
décrit dans le détail les mesures draconiennes prises en cette
occasion pour transformer les Bohémiens habitant dans des tentes ou
des huttes et suspectés de tous les maux en « nouveaux paysans ».
(Merci à Matei Cazacu pour ces précisions.)
L’étonnant poème
héroïco-satirique Tiganiada sau Tabãra þiganilor
(la Tsiganiade ou Le camp des Tziganes) de Ioan Budai-Deleanu, qui
marque les débuts de la littérature roumaine, composé en 1800 par
Ioan Budai-Deleanu (1760-1820), érudit marqué par les Lumières,
fonctionnaire autrichien à Lvov, peut être mis en rapport avec ces
débats. On trouve difficilement dans une autre œuvre littéraire
roumaine une telle empathie pour les Tsiganes.
13. Le mot
rumân désignait aussi, encore jusqu’au milieu
du XVIIIe siècle (1746) un statut social, celui de serf, et
rumânie le système de dépendance personnelle
des paysans par rapport aux boyards, avant d’acquérir un siècle
plus tard une signification nationale : Român (roumain)
et România (Roumanie). Les robi
(esclaves) étaient en revanche la propriété des boyards
et des monastères.
14. Sur ce point
aussi sa position a été constante, je me souviens en avoir parlé
lors des entretiens de 1981, la catégorie « gens de voyage », «
travellers » ou « caminanti » qui incluent les Roms citoyens
français, britanniques et italiens qui le souhaitent sans leur être
réservée à eux seuls, puisqu’il s’agit d’un droit
administratif et non mas ethnique, n’est pas une solution
envisageable pour les Roms des pays de l’Est pour une multitude de
raisons dont le fait qu’il n’y ai pratiquement plus de Roms
itinérants dans le sens traditionnel n’est pas la moindre.
15. Déclaration
de Nicolae Gheorghe à la Conférence sur la contribution des Fonds
européens à l’intégration de la population rom, Bucarest, les 12
et 13 octobre 2010. Une version abrégée cosignée avec Bertrand du
Puch, Alan Clark et Rupert Wolfe Murray est parue en français dans
la revue Projet n° 316, pp. 77-85, sous le titre « Le mythe du Rom
nomade : comment se défausser de la question rom sur l’Europe ».
16. Courrier
des Balkans, du 16 juillet 2012.
Nota: * Note de Dan Culcer. * Fâcheuse, car elle concerne l'image globale des Roumains hors les frontières de la Roumanie, la confusion entre les Roms et les Roumains est possible seulement au niveau de la terminologie utilisée dans la presse et les institutions dans des pays comme la France, principalement, ou on ne fait pas la distinction entre citoyenneté et nationalité ou identité communautaire, comme c'est le cas en Roumanie ou dans d'autre pays de l'Europe de l'Est, par exemple. Hors toute référence à des origines administratives, une minorité Tsigane mobile, identifiable par ses comportements asociaux et pénaux, est traitée souvent avec une excessive tolérance au nom de lutte contre l'intolérance. Les voleurs, les escrocs, les organisateurs de la mendicité des enfants et de la prostitution ne sont pas seulement de Tsiganes de Roumanie, ni simplement des Roms. Les Roms ne détiennent le monopole de ces occupations lucratives et non-imposables. Mais ceux qui les pratiquent savent se faufiler entre les paragraphes des lois et l'argent noir ainsi accumulé sert à la construction des palais biscornues en Roumanie, en Moldavie, en Hongrie, en Serbie etc. Ces bourgeoisies communautaires, qui contrôlent en partie le marché noir, devraient participer, comme tous les spéculateurs de l'évasion fiscale, à l'intégration sociale de leurs congénères, des communautés dont elles sont issues, pour compenser l'évasion fiscale notoire. D.C.
|
| |
Azi
Inca nu exista cel mai bun articol, pentru astazi. |
Societatea de maine
Daca nu acum, atunci cînd? Daca nu noi, atunci cine?
S'inscrire a Societatea de maine
Intrati in Societatea de maine
Exercitiu colectiv de imaginatie sociala
|
|
|
Inscriere : fr.groups.yahoo.com
Se dedica profesorului Mircea Zaciu
|
Ferește-te deopotrivã de prietenia dușmanului ca și de dușmãnia prietenului.
Viteazul priveºte pericolul; cutezãtorul îl cautã; nebunul nu-l vede.
Nicolae Iorga
|
Identificare
Inca nu aveti un cont? Puteti crea unul. Ca utilizator inregistrat aveti unele avantaje cum ar fi manager de teme, configurarea comentariilor si publicarea de comentarii cu numele dvs. |
|
|