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Eseuri: Teodor Zanoaga :Les formes et les fonctions du fantastique chez Mircea Eliade
Scris la Saturday, April 08 @ 14:24:45 CEST de catre asymetria |
Les formes et les fonctions du fantastique chez Mircea Eliade
„Esprit de l’amplitude“, selon l’expression du critique roumain Eugen
Simion, Mircea Eliade s’inscrit par la vastité de ses préoccupations
(histoire, mythologie, philosophie et littérature) dans le groupe des
personnalités totales de la culture roumaine, a côté de Dimitrie
Cantemir, Mihai Eminescu et Nicolae Iorga. Celui qui faisait partie de
„la nouvelle génération des esprits illuminés“, étant attiré , comme
disait Emil Cioran, „d’essence et d’accident, d’intemporal et de
quotidien , de mythe et de littérature“ a brillamment continué la
prose fantastique roumaine dont les précurseurs au XIX-ème siècle ont
été: Mihai Eminescu, Ion Creangã et I. L. Caragiale.
Catégorie esthétique à coté de beau, laid, gracieux et grotesque, le
fantastique représente „ l’hésitation de quelqu’un qui ne connaît que
les lois naturelles et qui est confronté à un événiment apparément
surnaturel“. ( Tz.Todorov,1973:8). Par conséquent, le fantastique
représente la perception d’une surrréalité surgie pas de la simple
imagination, (Phantesie), mais d’une activité productive par excellence
de l’esprit humain (Einbuildungskraft).
Les formes et les fonctions du fantastique chez Mircea Eliade
Mircea Eliade manifeste, comme Mihai Eminescu au XIX-ème siècle, une
préférence pour le fantastique philosophique. Eliade désire sauver par
le biais du fantastique, l’homme moderne, soumis à l’angoisse, qui,
tout comme l’homme romantique du XIX-ème siècle, veut dépasser sa
condition de simple mortel, situation qui se rencontre aussi dans les
contes populaires roumains. Le fantastique de Mircea Eliade, étant
ancré dans la réalité banale, s’approche indirectement du fantastique
anthropomorphisé du narrateur Ion Creangã , mais aussi du sensationnel
et de l’étrange presents chez I. L. Caragiale.
L’univers littéraire de Mircea Eliade se compose d’un groupe d’ouvrages
inspirées par le séjour de l’écrivain aux Indes (Isabel ºi apele
diavolului, ªantier) et d’une collection d’oeuvres d’inspiration
existentialiste ( Întoarcerea din rai, Huliganii) axés sur le thème de
l’évasion du réel et sur le thème du couple. Quant aux écrits
fantastiques, les plus importants sont le roman Noaptea de Sânziene,
paru en français sous le titre Forêt interdite, et les nouvelles:
Domniºoara Christina ( axée sur le thème du vampire du folklore
roumain), 19 trandafiri (écrite en exil et traîtant des implications
philosophiques du spectacle), La þigǎnci (allégorie du grand passage de
l’homme vers la mort). Les autres nouvelles (Pe strada Mântuleasa,
Ivan, Uniforme de general ) reprennent en grandes lignes l’ensemble des
problèmes concernant les textes ci-dessus sur lesquels on va travailler
pour découvrir les mécanismes qui engendrent le fantastique et les
fonctions de cette catégorie esthétique.
Les espaces du fantastique dans les nouvelles de Mircea Eliade ont
paradoxalement plusieurs éléments véridiques que des fantastiques.
L’anormalité surgit dans le cadre d’une normalité apparente. La ville
de Bucarest, par exemple, invahie par une canicule incendiaire ou un
manoir décrit pendant la journée ne paraissent cacher aucun mystère.
Pourtant, pour le lecteur initié, qui sait déchiffrer les signes, le
froid que le professeur Gavrilescu ressent auprès des maisons des
tziganes ou la décrépitude du manoir Moscu acquièrent une nuance de
mystère. Mais il y a une différence entre le faste oriental du premier
espace labyrinthique et la rigidité presque gothique du second espace
qu’on trouve non seulement dans le décor vétuste, mais aussi dans les
âmes des locataires.
Parfois, les espaces sont des scènes où des événements primordiaux sont
réconstitués, des événements qui se produissent et qui persistent
pendant la nuit tant que le surnaturel maintient sa présence. À la
lumière du jour, l’énérgie du fantastique s’épuise, les maisons des
tziaganes sont perçues comme des lieux immoraux, le manoir de madame
Moscu ne sera plus hanté par les revenants, mais il redeviendra la même
maison vétuste de l’autre jour. En plus, le manoir étant perçu à l’aube
comme une porte d’entrée du maléfique dans le monde des mortels,
il sera incendié et purifié.
La forêt, un autre topos mystérieux, est un espace privilégié où les
personnages espèrent entrer à la fin du processus d’initiation, quand
ils sont totalement assimilés au monde fantastique. C’est vers une
forêt des enigmes que partent le professeur Gavrilescu et Hildegard, sa
bien-aimée, et, toujours dans un espace semblable, le maître Pandele,
le personnage principal de la nouvelle 19 trandafiri a, à coté de sa
bien-aimée, la révélation d’Euridyce.La forêt représente un espace de
l’ambiguité. C’est un espace où les couples veulent permanentiser leur
bonheur et qui n’a plus les coordonnées du temps historique.Des
personnages comme Eusebiu, l’élève du maître Pandele, sont les témoins
de la sortie des initiés du monde profane et de leur intégration dans
le monde fantastique représenté par la forêt, espace pour lequel ils
ont nourri toute leur vie un sentiment de nostalgie.
Lorsqu’il est impossible de trouver des lieux où les énergies du
fantastiques peuvent se déployer, l’homme essaie de les imaginer
tout seul. C’est le cas du personnage ªtefan Viziru du roman Noaptea de
Sânziene ( Forêt interdite) qui a la capacité de créer sa propre
Shambala qu’il va appeler la chambre Sambô.Cet espace retiré du monde
profane devient fantastique justement parce que Viziru, le seul qui
peut y entrer, lui attribue une fonction sacrée.La chambre Sambô
représente un moyen de recréer le paradis au milieu du monde profane,
un rapprochement de Dieu, un reflexe de l’adulte qui veut remémorer
l’enfance perdue, un lieu où le temps profane a cessé couler, où Viziru
peut contempler le monde en toute tranquilité. Dès que Teodorescu, un
personnage suspecté par la police d’être le partisan des nazis y entre,
la chambre Sambô devenue entre temps un alter-ego de ªtefan Viziru, se
transforme dans un espace quelconque qui a perdu sa dimension sacrée.
Pour accéder à ces espacesi, les personnages ont besoin de certaines
„artifices“ ou „clés“. La canicule qui engendre l’amnésie perçue comme
un effet de l’appel insinuant de la destinée et le cocher pareil au
canotier Caron facilitent la sortie du protagoniste de la nouvelle La
þigãnci de l’espace profane et son entrée au monde sacré. Egor
rencontre mademoiselle Christina dans ses rêves.Les trois rêveries
qu’il a, se transforment en cauchemars, car la magie de mademoiselle
Christina envahit Egor avec sensualité et démonisme.
L’accès du maître Pandele dans la forêt oubliée par tout le monde se
fait à la suite d’un rituel d’éveil (metanoia) accompli graduellement
par Niculina, par le biais duquel on parcourt inversement toutes les
étapes de l’évolution humaine jusqu’à l’identification totale avec
l’Archétype.
Enfin,ªtefan Viziru peut sortir du temps profane seulement par
l’intermédiaire de l’amour qui est la clé d’accès vers le monde du
sacré. Le passage proprement dit d’un monde à l’autre suppose une mort
symbolique, toujours remise , mais qui a un lieu et un rôle bien
précisés dans l’évolution spirituelle de l’homme. Par conséquence, le
passage vers le monde fantastique suppose une initiation qu’on peut
suivre aussi au niveau des personnages.
Les protagonistes des nouvelles désirent soit entrer dans le monde
fantastique (Viziru, Pandele) , soit en sortir ( Egor, Gavrilescu).
Eliade a le talent littéraire de garder la cohérence de ses personnages
qui glissent du réel dans l’irréel. Ils essaient de deviner les signes,
hésitent avant d’être complétement assimilés au monde fantastique.Le
lecteur désire toujours s’identifier à eux.
Une autre catégorie de personnages groupe les „agents
extrahumains“. Ceux-ci transforment, selon l’expression de Mircea
Eliade, „un épisode dans un destin et un état d’âme dans un délire“. Ce
genre de personnages disposent du destin des autres et leurs réactions
déroutantes démontrent le fait qu’ils ont un statut moral
contradictoire:les trois tziganes donnent à Gavrilescu toutes sortes
d’indices afin que celui-ci les devine dans l’obscurité de la chambre,
mais quand il commet une erreur,elles entrent dans une ronde
chaotique et commencent de se moquer de lui. La vieille tzigane
facilite le passage du professeur dans le labyrinthe, mais elle le
déroute en meme temps en lui conseillant de frapper à la septième
porte.La vraie essence de mademoiselle Christina, quoique celle-ci
semble aimer reéllement Egor, est maléfique, satanique.
Dans la plupart des cas, ces agents extrahumains accomplissent leurs
tâches par le biais des personnages auxiliares qu’ils „contaminent“ et
auxquels ils prêtent leur propre personalité:Simina, une enfant très
obeisante en apparence, est bizarre, méchante ,pareille aux fillettes
vicieuses de la littérature indienne,imprévisible,mystérieuse,un
alter-ego diurne et un outil très précieux pour mademoiselle Christina.
Irina, l’épouse de Vadastra, un des personnages du roman Noaptea de
Sânziene, devient après la mort de celui-ci une sainte ayant le pouvoir
de prédiction.
Enfin, il y a chez Mircea Eliade des personnages sceptiques vis-à-vis
de l’existence du monde fantastique, par exemple le commissaire
Protopopescu, un autre personnage de Noaptea de Sânziene où Albini (19
trandafiri). Ils essaient de trouver une explication logique aux
événements fantastiques et, par la suite, ils sont cérébraux,
sceptiques, antipathiques.Toute tentative destinée à expliquer du point
de vue logique le monde fantastique et vouée à l’echec. Celui qui
possède le sentiment du fantastique accepte de se laisser envahi
du mystère sans essayer de trouver des explications logiques. Sans la
dimension du fantastique, ces personnages sont d’une nudité morale
effrayante. Parfois, leur attitude sceptique vis-à-vis du fantastique
peut être déduite à partir de la signification de leurs noms: Nazarie
est un lâche (Nazarie
Il y a ensuite quelques sources du fantastique subordonnées à l’action,
qui jouent un rôle très important dans les narrations de Mircea
Eliade.Dans la plupart des situations, le fantastique apparaît grâce à
une tension qui existe entre le sacré et le profane.Les événements
racontés n’ont pas de valeur que s’ils se rapportent aux aspects
mythiques qu’ils „camouflent“.Mais tous supposent un scénario
initiatique.Le fantastique naît au moment où l’on réussit à percevoir
les événements comme inédits,sensationnels,chargés de significations,en
bref, mythiques. Le professeur Gavrilescu ne vit pas dans les maisons
des tziganes une expérience commune, mais il rencontre les filles du
Destin même qui se sont decidées de lui accorder une seconde chance
pour refaire sa vie; Egor n’a pas seulement des cauchemars effrayants,
mais il arrive à les prendre pour des expériences du réel; mademoiselle
Christina n’est pas une illusion,le produit d’une rêverie,mais un être
matériel:Pandele n’est pas mort à la suite d’un accident banal, mais il
a passé la dernière étape du processus d’initiation dans le monde du
fantastique, en disparaîssant en meme temps du monde profane; Viziru ne
cherche pas une fille quelconque, mais Ileana Cosânzeana (fée qui
apparaît dans les contes populaires roumains, il cherche son chez soi
tel qu’Ulysse cherchait Ithaque et il se laisse séduit par madame Zissu
tel que le héros de Homère a été séduit par Cyrcé.De ce point de vue ,
le fantastique s’identifie chez Mircea Eliade avec le mythe.
La deuxième source du fantastique est le spectacle. Mircea Eliade
considère que les spectateurs appartiennent au monde qui a perdu les
coordonnées du sacré, où l’on a déjà proclamé „le crépuscule des
dieux“. Pour eux,le temps équivaut à un passage irréversible, ce qui
empêche le retour aux mythes. Les acteurs déterminent par le biais du
jeu scénique, un processus de „ sacralisation “du monde. Le jeu
hallucinant des tziganes et le jeu de Niculina, semblables aux rites
ancestraux , les apparitions déroutantes de mademoiselles Christina, la
tentation de Biriº de sortir du temps commun par la création de sa
propre pièce de théâtre expérimental, tous ces événements se
subordonnent au thème du spectacle. Les acteurs ont un accès libre vers
la sacralité grâce à l’acte ludique et la représentation fonctionne en
vertu des lois et des mácanismes inconnus , fait qui crée, par le biais
de l’ésotérisme, une captatio benevolentiae du néophyte: Gavrilescu se
décide d’entrer dans le jeu à la ronde des tziganes, Egor reste séduit
pour toujours par la beauté de mademoiselle Christina, Pandele hésite
de croire s’il a réellement rencontré Euridyce, Biriº apprécie très
satisfait sa propre pièce de théâtre expérimental.
Le troisième mécanisme qui engendre le fantastique est la dialectique
entre le sacré et le profane. En général, les personnages de Mircea
Eliade désirent de supprimer le réel et de s’accorder aux
rythmes cosmiques et „ aux pulsations du temps sacré primordial ,
récupérable à l’infini.“(Mircea Eliade, 1963:18). Le temps se dilate ou
se comprime et naît dans la conscience des personnages. Le professeur
Gavrilescu vit une crise du réel dès qu’il sorte des maisons des
tziganes où le temps cosmique a fait une brèche dans le réel supprimant
ainsi le temps individuel. Il apprend que quelques heures écoulées dans
les maisons des tziganes équivalent 12 dans le monde extérieur. Egor,
le protagoniste de la nouvelle 19 trandafiri, vit aussi une crise du
réel ; pour lui , la nuit passée dans le manoir hanté par mademoiselle
Christina semblait ne pas prendre fin. On peut parler par conséquent,
d’une fascination de la nuit chez Mircea Eliade, ce temps étant
favorable au déchaînement des forces fantastiques. La nuit du Noël et
de la Sainte Diane (noaptea de Sânziene) sont des événements
exceptionnels, de véritables portes temporelles pour l’entrée du sacré
dans le monde profane. Le maître Pandele a eu pendant la nuit de Noël
une révelation qui l’a tant impressionné que son souconscient l’a
répudiée. Les efforts du personnage seront ont le but de
remémorer ce temps sacré. ªtefan Viziru est lui aussi fasciné par le
mirage d’une autre nuit: celle de la Sainte Diane, lorsque, selon le
folklore chrétien roumain, les portes des cieux s’ouvrent
largement.Viziru a connu pendant cette nuit la jeune Ileana,sa
bien-aimée, et ils auraient pu transcender, s’ils avaient trouvé
un véhicule magique: la voiture.
À coté du temps sacré donc, il y a le temps profane anihilant,
dévitalisant, dépourvu de fantastique. Le prosateur tient à souligner
aussi les caractéristiques du temps profane, source des conflits et des
guerres. C’est un moyen de valoriser le fantastique par son contraire:
l’excès du réel. C’est pourquoi Eliade présente en détail des
scènes cruelles de la deuxième guerre mondiale ( les bombardements de
Londres et de Bucarest) et insiste aussi sur la rutine de l’homme
moderne qui a perdu de vue l’unité du monde et qui conçoit le monde
seulement du point de vue fragmentaire.
À part ces formes particulières, chez Mircea Eliade on rencontre
les formes du fantastique présentes dans toutes les littératures du
monde. La numérologie joue de ce point de vue un rôle important.
La vie de Viziru a été decrite pendant 12 ans, durée qui représente une
année cosmique, la fin du cycle existentiel du personnage, et sa
renaissance dans le monde de l’ésprit. Le chiffre trois revient d’une
manière obsessive dans certaines nouvelles. Gavrilescu prend d’habitude
le tramway trois fois par semaine, la montre de la maison des tziganes
indique la même heure : trois de l’apres-midi, les tziganes qui jouent
à la ronde sont trois, tout comme les filles du Destin et Egor a trois
rêves dans le manoir hanté. Comme dans les contes roumaines , ce numéro
signifie l’équilibre, la perfection et suppose en même temps la thèse,
l’antithèse et la synthèse, c’est-à-dire la lutte de l’homme contre le
monde profane et son intégration dans un monde supérieur. La troisième
épreuve est capitale car elle synthétise la force des deux
épreuves antérieures Dix-neuf, le nombre des roses mystérieuses reçues
par Eusebiu, signifie le labyrinthe de la vie . Après que six d’entre
elles ont fané, Eusebiu a compté seulement treize roses dans le
bouquet. Treize symbolise le recommencement de la vie; il désigne un
cycle(douze) et une unité de commencement.
Dans les narrations d’Eliade la causalité réelle, souvent absente, est
remplacée par la causalité surnaturelle ou bien par ce que le
philosophe Mircea Eliade appelle „coincidentia oppositorum“. Le
professeur Gavrilescu a oublié sa serviette et ses partitions comme
„par hasard“ et toujours „par hasard“ il perd le tramway. Eusebiu
habille aussi „par hasard“ le meilleur complet de sa garde-robe pour
les noces de Niculina et de Marian Serdaru. On déduit que tous ces
faits sans une logique intérieure en apparence sont gouvernés par les
lois inconnus du destin. Le froid artificiel qui commence soudain dans
le manoir de madame Moscu, la décrépitude de celle-ci et le
comportement bizarre de Sanda sont des indices qui anticipent la
naissance du maléfique dans le monde, le fait que les forces du mal
commencent d’agir peu à peu dans le monde des mortels. La suite des
morts à la fin du roman Forêt interdite nous donne des raisons à
croire que la présence du destin est plus intense dans ce roman que
dans les autres narrations de Mircea Eliade.
On peut parler aussi de l’existence d’un fantastique instrumental: les
objets apparément banals ont une signification spéciale. Le café que
les tziganes offrent à Gavrilescu a le rôle de provoquer à celui-ci un
faux réveil, étant un elixire capable de canaliser sa mémoire vers le
vrai amour; la voiture recherchée toute la vie par ªtefan Viziru
devient un lien entre le réel et l’irréel.
Dans la nouvelle La þigãnci est présent le fantastique absurde qu’on
peut reconnaître au moment où le professeur Gavrilescu cherche la
sortie du labyrinthe des choses qui ont perdu leurs significations ,
comme dans les pièces d’Eugène Ionesco, et au milieu desquelles l’homme
a le sentiment d’être dépossédé de son propre destin.
Toujours un indice de la présence du fantastique est l’hésitation
permanente du lecteur:on ne sait pas, par exemple, si tout ce qui s’est
passé dans la vie du professeur Gavrilescu a vraiment eu lieu ou bien
c’est seulement une hallucination engendrée par la canicule. En plus,
les oeuvres ont un final ouvert realisé par l’emploi de
la technique du palimpseste. L’écrivain sait entretenir le
suspense fantastique sans offrir au lecteur aucune clé de lecture. Il
l’oblige ainsi de devenir co-auteur, de s’impliquer directement dans la
création de l’oeuvre. Est-ce que Gavrilescu, Pandele, Viziru sont morts
ou bien ils sont partis seulement un peu de ce monde? Mircea Eliade
affirmait dans son Journal que partir c’est mourir un peu pour soi et
pour le monde profane. Qu’est-ce que signifie la salle bizarre remplie
des gens qui jouaient aux cartes, à la fin du roman Domniºoara
Christina? Ces questions résument les nouvelles de Mircea Eliade qui
ont une structure moderne, ouverte et exigent une lecture répétée.
Est-ce qu’on est à la fin ou bien au début de la lecture? Tout comme
James Joyce, Mircea Eliade ne facilite pas la démarche du lecteur, mais
il veut plutôt le dérouter à chaque page de l’écriture et
l’obliger ainsi de se débrouiller tout seul dans le labyrinthe
d’un roman comme Noaptea de Sânziene.
Le fantastique peut être suivi enfin au niveau du langage. Quoique
l’immense matériel narratif mette parfois en difficulté le prosateur,
on peut dire que par le logos ,Eliade a une intuition métaphorique du
monde(Einfürung). Il met son oeuvre sous le signe de l’ambiguité par
l’emploi fréquent de l’imparfait (on ne sait pas si l’action passée
déborde dans le présent), par la modalisation des énoncés à l’aide des
constructions élliptiques, des adverbes (poate „peut-être“,posibil
„possible“)ou des verbes (se pare„ il paraît que“). Les personnages
aiment parler d’une façon ambigue.
Par conséquent, les formes de manifestation du fantastique contribuent
à la formation d’un monde propre dont la cohérence se maintient grâce
aux fonctions de cette catégorie esthétique.
La première fonction du fantastique est la fonction littéraire. Mircea
Eliade espère que l’homme moderne pourra se soustraire à la terreur
quoiqu’il ait perdu le sentiment de réligiosité. „L’histoire devient
chez Mircea Eliade un moyen de définir l’éphémère, un corset de l’être
eternel, et, à cause de cela , il exerce une véritable terreur sur
l’âme qui veut se sauver.“ (Doina Rusti, 1997:73). Le prosateur désire
de démontrer que l’homme contemporain n’a pas entièrement perdu la
partie spirituelle et que, dans un monde où les valeurs spirituelles
sont remplacées par les valeurs matérielles, il n’est pas seulement une
somme de complexes freudistes, mais aussi une somme de mythes. L’homme
moderne traverse une période de crise parce qu’il a oublié d’où il
vient, quelle est son origine. La nouvelle La þigãnci est de ce point
de vue un plédoyer pour le droit à la bonheur de l’homme simple,
commun. Lorsque l’être humain est réduit à l’histoire, son seul moyen
de se sauver est l’imagination. Le fantastique a, par
conséquence, la fonction de compenser par le biais de la littérature
les désirs irréalisables. L’homme moderne souffre à cause du fait qu’il
n’a pas bien deviné les signes de la destinée. Et pourtant, le
fantastique offre à Gavrilescu la chance de recommencer sa vie, de
rencontrer Hildegard, sa bien-aimée, ici, sur la terre. Tout commence
comme ça, par un rêve“, dit celle-ci à la fin de la nouvelle La
þigãnci. Par l’intermédiaire du rêve , nous avons la possibilité d’être
nos propres démiurges, de nous connaître comme nous sommes en réalité,
de donner une explication à notre tragique amnésie qui nous empêche de
savoir qui nous sommes.
Eliade accorde aux mythes bénéfiques la chance d’avoir une fin
heureuse: quant aux mythes maléfiques, il les „démythifie“, à savoir il
les vide de leur contenu sacré. L’incendie éclaté dans le manoir de
madame Moscu, se transforme dans un chaos de grandes proportions. Tout
prend l’aspect d’une rébéllion contre les forces du mal qui sera vaincu
par l’acte final de l’exorcisme qui vise mademoiselle Christina.
L’auteur Mircea Eliade envisage de nouveau les rapports de
l’humain avec l’au-delà dans le roman Domniºoara Christina . Christina
désire s’humaniser par l’amour pour un mortel et devient ainsi un
personnage tragique comme Hyperion du poème Luceafãrul de Mihai
Eminescu. Elle nuit à l’ordre et à l’harmonie du monde des mortels
mais,quand même, par l’acte final du sacrifice, elle réclame une
certaine compassion de la part du lecteur. Puisque Egor
ressent un certain regret d’avoir tué Christina sous forme d’une
nostalgie de l’absolut, on se demande si Mircea Eliade n’a pas voulu
traîter dans ce roman de l’homme et de la tentation qui exerce sur lui
le mal, de sa projection en absolut, en bref, du fait qu’il est situé
au carrefour du sacré et du profane.
L’écrivain donne aux mythes positives la chance de s’accomplir dans
notre monde,d’avoir une fin heureuse. C’est le message final de la
nouvelle 19 trandafiri et du roman Noaptea de Sânziene. L’homme vit et
répète parfois, sans le vouloir, certains scénarios mythiques mais,pour
être heureux, il doit deviner les signes du destin. „L’homme n’est pas
seul dans l’univers, voilà la conviction d’Eliade et tous ses écrits ne
font que démontrer que l’homme vit aujourd’hui des mythes et que dans
ses gestes les plus simples se manifeste une relation ancienne et
profonde, un rituel sacré.“ (Eugen Simion,1995:11). Le prosateur offre
par ce que Roland Barthes appelle „ la joie de la lecture“, la
possibilité de dépasser le contingent, à savoir la compensation du
désir de transgresser les limites du réel grâce à l’acte de l’écriture
et de l’imagination. On peut déduire de toutes les nouvelles de Mircea
Eliade une philosophie optimiste, la confiance que l’homme peut se
soustraire de l’histoire par le biais du fantastique , de la
littérature en général. Quand même, Eliade semble nier son oeuvre
vers la fin de sa période de création dans le roman Noaptea de
Sânziene. „Le couple idéal,notait-il dans son Journal, ne peut exister
que dans l’imagination. “Le dénouement du roman suppose une certaine
méfiance envers le fantastique, un regret et l’acceptation de la mort
comme une fatalité. Seulement par le biais de la mort l’homme peut se
soustraire du temps profane; la chambre Sambô n’est que l’illusion de
l’accomplissement de l’homme sur la terre tout comme le fantastique
même.
La deuxième fonction du fantastique de Mircea Eliade est la
fonction sociale. Le fantastique devient un pretexte à l’abri duquel
le prosateur a la libérté de dire des avis personnels, sous
une formes plus ou moins ambigue, plus ou moins symbolique, des choses
qui normalement étaient interdites par la censure communiste en
Roumanie. Nombreuses pages du roman Noaptea de Sânziene condamnent le
début du régime communiste de Roumanie. Viziru s’assume une liberté de
penser incompatible avec le système politique opressif qui
détruira Vãdastra, Biriº et Partenie. Des commissiares
antipathiques interprètent les tentatives des héros de se soustraire du
temps profane comme des tentatives de révolte contre le régime
politique de Roumanie. De l’autre coté, le lecteur déduit , malgré les
nombreuses descriptions terrifiantes et détaillées des scènes de
guerre, l’existence d’un message humaniste: la condamnation de la
guerre, le droit de l’homme à la liberté et au rêve. Eliade s’est nomé
maintes fois le défenseur des rêveurs de partout. Le geste d’Irina de
transporter des livres pour les Établissements culturels, l’essai de
Vãdastra de sauver pendant les bombardements un tableau de Rubens, tout
cela prouve que, l’homme essaie de se sauver dans les circonstances
difficiles par l’intermédiaire de l’art. De ce point de vue, la
fonction du fantastique s’identifie avec la fonction de l’art en
général.
En conclusion, chez le prosateur roumain , il y a une liaison étroite
entre la nature et les fonctions du fantastique. Ses nombreuses formes
identifient le fantastique au mythe et à l’art en général.
Eliade fait partie d’une famille plus larges d’esprits littéraires. Il
se ressemble du point de vue de la création artistique à l’écrivain
argentinien Jorges Louis Borges. Des thèmes comme : le temps,
l’histoire, le labyrinthe se retrouvent également chez les deux
écrivains. Celui qui lit Eliade et Borges entre dans un monde
apparément banale, d’où il a accès à la connaissance supérieure. Le
personnage principal de la nouvelle L’immortel de Borges nourrit le
même désir de supprimer le profane et d’accéder aux coordonnées du
sacré comme Viziru et le maître Pandele .Chez les deux écrivains, la
supprimation du temps profane ne constitue pas un motif littéraire,
mais une aspiration philosophique personnelle.
En comparaison avec le fantastique balkanique de Caragiale qui explique
même au dernier moment sa solution, le fantastique proposé par Mircea
Eliade est sensationnel parce qu’il remet son mystère jusqu’à la fin de
l’oeuvre. Eliade s’approche aussi de l’écrivain Vasile Voiculescu chez
qui le fantastique s’appuie notamment sur les croyances et les coutumes
présentes dans le folklore roumain. Mais la structure labyrinthique des
nouvelles de Mircea Eliade s’oppose du point de vue formel à la
structure des contes de Voiculescu, semblable à celle des contes
populaires roumaines. En plus, on constate que tous les deux écrivains
emploient l’allégorie et le symbole.
L’oeuvre de Mircea Eliade impose une redéfinition du terme fantastique
qui dépasse les limites de la littérature. „Puisqu’il se situe sous le
signe de Prothée, le trait fondamental du fantastique est la variété,
la multitude des aspects qu’il peut manifester.“ (Gh.Glodeanu,1997:7).
Chez Mircea Eliade, le fantastique dépasse les limites d’une
catégorie esthétique, il est „un état d’esprit“, „une émotion
supérieure“, une alternative de vie spirituelle à la quelle on a accès
par le biais de la lecture, un moyen de s’échapper à une histoire
cruelle. À cette alternative ont recours pendant le régime communiste
beaucoup d’écrivains roumains contraints de vivre un exil
intérieur; pour eux, la littérature et ses possibilités d’évasion,
l’imagination et l’acte de la lecture représentaient le seul espace de
la liberté et le seul moyen, dans une société qui minimisait
l’importance de l’individu, de garder son individualité.
Le fantastique fait partie de notre existence - c’est le message
indirect des nouvelles de Mircea Eliade. Pour l’homme moderne qui
est en quête d’un moyen de refaire l’unité spirituelle du monde, unité
réalisée jadis en illo tempore, l’imagination et la propension
vers le fantastique pourraient être une solution.
Bibliographie:
1. ***, 1997: Book World Encyclopedia, vol. VIII., Chicago
2. Eliade,Mircea, 1963:Aspects du mythe, Paris, Gallimard
3. Idem, 1991:Prozã fantasticã,5 vol., Bucureºti, Editura Fundaþiei culturale române
4. Idem,1993: Jurnal, 2 vol., Bucureºti, Humanitas
5. Idem,2000: Sacrul ºi profanul, Bucureºti,
6. ***,1997, Eliadiana, Iaºi, Editura Polirom
7. Glodeanu, Gheorghe, 1993: Fantasticul în proza lui Mircea Eliade, Baia-Mare, Editura Gutinul
8. Marino, Adrian, 1973: Dicþionar de idei literare, 2 vol., Bucureºti, Editura Eminescu
9. Ruºti, Doina, 1997: Dicþionar de simboluri din opera lui Mircea Eliade, Bucureºti, Editura Coresi
10. Simion, Eugen, 1995: Mircea Eliade,spirit al amplitudinii, Bucureºti, Editura Demiurg
11.Todorov, Tzvetan, 1995: Introducere în literatura fantasticã, Bucureºti, Editura Univers
12.Wellek ºi Warren, 1967 : Teoria literaturii, Bucureºti, Editura pentru literaturã universalã.
Nota: 1. ***, 1997: Book World Encyclopedia, vol. VIII., Chicago
2. Eliade,Mircea, 1963:Aspects du mythe, Paris, Gallimard
3. Idem, 1991:Prozã fantasticã,5 vol., Bucureºti, Editura Fundaþiei culturale române
4. Idem,1993: Jurnal, 2 vol., Bucureºti, Humanitas
5. Idem,2000: Sacrul ºi profanul, Bucureºti,
6. ***,1997, Eliadiana, Iaºi, Editura Polirom
7. Glodeanu, Gheorghe, 1993: Fantasticul în proza lui Mircea Eliade, Baia-Mare, Editura Gutinul
8. Marino, Adrian, 1973: Dicþionar de idei literare, 2 vol., Bucureºti, Editura Eminescu
9. Ruºti, Doina, 1997: Dicþionar de simboluri din opera lui Mircea Eliade, Bucureºti, Editura Coresi
10. Simion, Eugen, 1995: Mircea Eliade,spirit al amplitudinii, Bucureºti, Editura Demiurg
11.Todorov, Tzvetan, 1995: Introducere în literatura fantasticã, Bucureºti, Editura Univers
12.Wellek ºi Warren, 1967 : Teoria literaturii, Bucureºti, Editura pentru literaturã universalã.
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